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philippelenoir-popculture.com

Journaliste professionnel, je propose ici de partager avec vous mes coups de coeur, mes avis et ma passion pour la culture populaire sous toutes ses formes.

Let It Be, le chant du cygne qui conclut la prodigieuse aventures des Beatles

Let It Be, le chant du cygne qui conclut la prodigieuse aventures des Beatles

Drôle de destinée que Let It Be, l'une des plus célèbres chansons des Beatles, mais aussi le titre de leur dernier album si l'on s'en tient à la chronologie de sa sortie commerciale en mai 1970. C'était il y a cinquante ans, un début de printemps bien mélancolique qui scellait la fin du plus grand groupe de pop music de l'histoire. L'événement reste assez confus à la lueur des stratégies de communication et de marketing utilisées aujourd'hui dans l'industrie musicale. Il aura donc fallu que Paul McCartney sorte un communiqué le 10 avril 1970 pour que soit validé la fin officielle des Beatles, un texte que le bassiste se voit contraint de rédiger de son initiative personnelle pour défendre la sortie de son premier album solo. Un moment d'autant plus surréaliste que les trois autres membres sont déjà engagés dans des projets personnels en dehors des Beatles. John Lennon surtout, qui s'investit résolument dans le Plastic Ono Band, le groupe qu'il a fondé avec sa compagne Yoko Ono. Mais George Harrison et Ringo Starr ne sont pas en reste travaillant eux aussi, sur des albums sous leur propre nom. Néanmoins, au début du printemps 1970, c'est bien la chanson Let It Be, sorti en format 45-tours qui cartonne dans le monde entier, se classant numéro 1 aux USA et numéro 2 en Angleterre laissant générer l'illusion que tout n'est pas fini.

Même si le titre Let It Be que l'on peut traduire par Ainsi Soit-Il est prémonitoire de l'achèvement d'une aventure artistique unique. La chanson est très liée à son auteur Paul McCartney qui a raconté que le texte lui avait été inspiré par une rêverie où sa mère lui était apparue pour lui dire Just Let It Be. C'est donc ainsi qu'il faut entendre Mother Mary, le prénom de la mère de Paul et non pas la Vierge Marie comme beaucoup l'ont compris à l'époque. Néanmoins, John Lennon a longtemps estimé que Let It Be n'était pas digne du groupe qu'il avait fondé. Lennon avait exprimé son hostilité du christianisme depuis longtemps et ne donnait guère de crédit aux explications de McCartney. De plus, il la qualifia de chanson de grand-mère singeant les ballades de Simon & Garfunkel. Cette divergence marque surtout l'état exécrable des relations entre les deux leaders des Beatles, d'autant que Paul McCartney impose sa ligne artistique au groupe au détriment des expérimentations musicales souhaitées par John Lennon sous l'influence de Yoko Ono.. En fait d'évidence, Paul McCartney est le seul à être encore motivé à porter le groupe à l'heure d'enregistrer Let It Be à l'hiver 1969.

Let It Be, le chant du cygne qui conclut la prodigieuse aventures des Beatles

Car le titre s'inscrivait originellement dans le projet Get Back, un concept qui devait renouer avec la simplicité rock des Beatles après la sophistication pop et psychédélique symbolisée par les albums Sgt Pepper Lonely Heart's Club Band et le White Album. Mais rien n'y fait, les Fab Four n'en peuvent plus de jouer ensemble, ce dont témoigne un film documentaire qui accompagnait les sessions Get Back. C'est d'ailleurs pour ce film que les Beatles se produiront sur le toit de leur maison de disques Apple en janvier 1969. Une prestation surréaliste qui montre à quel point plus personne n'est capable de maîtriser le groupe. Au point d'abandonner Get Back qui ne semble n'avoir plus aucun sens pour quatre artistes en déroute collective. Pourtant six mois plus tard, à l'été 1969, comme un miracle, les Beatles se retrouvent aux studios EMI pour mettre en boite Abbey Road, un album considéré à juste titre comme un chef d’œuvre. Mais, si à sa sortie, en septembre 1969, Abbey Road peut donner l'illusion d'un retour en grâce, il ne tient pas plus que quelques jours quand John Lennon s'invite sur la scène du festival de Toronto avec le Plastic Ono Band. Le chanteur-fondateur du groupe décide dès lors de ne plus être un Beatle et le fait savoir aux autres. Mais pour des raisons stratégiques, le groupe est encore déclaré vivant en prévision des ventes astronomiques d'Abbey Road jusqu'aux fêtes de fin d'année.

 

C'est donc une lente agonie qui démarre, mais qui doit se conclure par un dernier projet commercial lié aux exigences financières du label Apple dont les Beatles sont actionnaires. Et c'est ainsi que ressortent les sessions Get Back où se niche Let It Be qui sort en single en mars pour devenir la locomotive du dernier album officiel des Beatles. Une sorte de disque posthume qui se nommera aussi Let It Be. La pochette ne laisse aucun doute sur son message funeste  : quatre portraits distincts de John, Paul, George et Ringo regardant dans des directions différentes encadrées d'un large bandeau noir. Allen Klein, le dernier manager du groupe confie, sur recommandation de John Lennon, les bandes de Get Back au producteur Phil Spector, l'architecte du Wall of Sound, ce concept qui consiste à superposer des arrangements de cordes, de cuivres et mêmes de choeurs sur une chanson. Certains disent que le producteur a sauvé les meubles face à un piètre matériau musical. McCartney ne cachera pas son hostilité face à la surproduction de Spector, jusqu'à décider en 2003 de sortir une nouvelle version de Let It Be dan une version dépouillée. Néanmoins, la sortie du disque en mai 1970 sera un événement considérable avec un record de préventes, mais sera jugé sévèrement par la critique d'époque.

 

Aujourd'hui, l'album est réhabilité, même s'il reste un opus moyen de l'avis général. Il manque surtout de cohérence artistique à l'image des sessions en questions. On y trouve néanmoins le fameux Get Back, mais aussi des pépites comme Across The Universe, Two Of Us, The Long And Winding Road et surtout Let It Be. Un véritable standard du groupe, le plus programmé en radio avec Yesterday ou Hey Jude. Cinquante ans plus tard, elle conserve toujours la mélancolie profonde de son auteur face à la chaotique fin du plus grand groupe de l'histoire du rock. Quand à l'album du même nom, il conserve une véritable dimension patrimoniale à défaut d'être un élément majeur de la discographie prestigieuse du groupe. Car on y perçoit à quel point ces quatre musiciens sortent essorés d'une décennie folle où ils ont captivé le monde par leur capacité à réaliser ensemble l'une des œuvres les plus fortes du XXe siècle. George Martin, le producteur historique des Beatles dira qu'il y avait de l'ordre du divin quand John,Paul,George et Ringo étaient réunis en studio. Let It Be est un titre qui résume assez bien ce mystère indicible, même s'il en signa la fin définitive dans un désordre profondément humain.

http://philippelenoir-popculture.com/2019/08/l-album-abbey-road-des-beatles-fete-ses-50-ans-nos-cinq-pochettes-de-disques-mythiques-du-rock.html

http://philippelenoir-popculture.com/2019/08/woodstock-le-sommet-et-la-fin-du-flower-power-nos-cinq-chansons-preferees-a-la-mode-hippie.html

Let It Be, le chant du cygne qui conclut la prodigieuse aventures des Beatles
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